J.O. Numéro 265 du 16 Novembre 1999 page 16959
Lois
LOI no 99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité
(1)
NOR : JUSX9803236L
L'Assemblée nationale et le Sénat ont délibéré,
L'Assemblée nationale a adopté,
Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 99-419 DC en date du 9 novembre 1999 ;
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
Article 1er
Le livre Ier du code civil est complété par un titre XII ainsi rédigé :
"TITRE XII
"DU PACTE CIVIL DE SOLIDARITE ET DU CONCUBINAGE
"Chapitre Ier
"Du pacte civil de solidarité
"Art. 515-1. - Un pacte civil de solidarité est un contrat conclu par deux personnes
physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune.
" Art. 515-2. - A peine de nullité, il ne peut y avoir de pacte civil de
solidarité :
"1° Entre ascendant et descendant en ligne directe, entre alliés en ligne directe
et entre collatéraux jusqu'au troisième degré inclus ;
"2° Entre deux personnes dont l'une au moins est engagée dans les liens du
mariage ;
"3° Entre deux personnes dont l'une au moins est déjà liée par un pacte civil de
solidarité.
"Art. 515-3. - Deux personnes qui concluent un pacte civil de solidarité en font la
déclaration conjointe au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel elles
fixent leur résidence commune.
"À peine d'irrecevabilité, elles produisent au greffier la convention passée entre
elles en double original et joignent les pièces d'état civil permettant d'établir la
validité de l'acte au regard de l'article 515-2 ainsi qu'un certificat du greffe du
tribunal d'instance de leur lieu de naissance ou, en cas de naissance à l'étranger, du
greffe du tribunal de grande instance de Paris, attestant qu'elles ne sont pas déjà
liées par un pacte civil de solidarité.
"Après production de l'ensemble des pièces, le greffier inscrit cette déclaration
sur un registre.
"Le greffier vise et date les deux exemplaires originaux de la convention et les
restitue à chaque partenaire.
"Il fait porter mention de la déclaration sur un registre tenu au greffe du tribunal
d'instance du lieu de naissance de chaque partenaire ou, en cas de naissance à
l'étranger, au greffe du tribunal de grande instance de Paris.
"L'inscription sur le registre du lieu de résidence confère date certaine au pacte
civil de solidarité et le rend opposable aux tiers.
"Toute modification du pacte fait l'objet d'une déclaration conjointe inscrite au
greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial, à laquelle est joint, à peine
d'irrecevabilité et en double original, l'acte portant modification de la convention. Les
formalités prévues au quatrième alinéa sont applicables.
"À l'étranger, l'inscription de la déclaration conjointe d'un pacte liant deux
partenaires dont l'un au moins est de nationalité française et les formalités prévues
aux deuxième et quatrième alinéas sont assurées par les agents diplomatiques et
consulaires français ainsi que celles requises en cas de modification du pacte.
"Art. 515-4. - Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s'apportent
une aide mutuelle et matérielle. Les modalités de cette aide sont fixées par le pacte.
"Les partenaires sont tenus solidairement à l'égard des tiers des dettes
contractées par l'un d'eux pour les besoins de la vie courante et pour les dépenses
relatives au logement commun.
"Art. 515-5. - Les partenaires d'un pacte civil de solidarité indiquent, dans la
convention visée au deuxième alinéa de l'article 515-3, s'ils entendent soumettre au
régime de l'indivision les meubles meublants dont ils feraient l'acquisition à titre
onéreux postérieurement à la conclusion du pacte. A défaut, ces meubles sont
présumés indivis par moitié. Il en est de même lorsque la date d'acquisition de ces
biens ne peut être établie.
"Les autres biens dont les partenaires deviennent propriétaires à titre onéreux
postérieurement à la conclusion du pacte sont présumés indivis par moitié si l'acte
d'acquisition ou de souscription n'en dispose autrement.
"Art. 515-6. - Les dispositions de l'article 832 sont applicables entre partenaires
d'un pacte civil de solidarité en cas de dissolution de celui-ci, à l'exception de
celles relatives à tout ou partie d'une exploitation agricole, ainsi qu'à une quote-part
indivise ou aux parts sociales de cette exploitation.
"Art. 515-7. - Lorsque les partenaires décident d'un commun accord de mettre fin au
pacte civil de solidarité, ils remettent une déclaration conjointe écrite au greffe du
tribunal d'instance dans le ressort duquel l'un d'entre eux au moins a sa résidence. Le
greffier inscrit cette déclaration sur un registre et en assure la conservation.
"Lorsque l'un des partenaires décide de mettre fin au pacte civil de solidarité, il
signifie à l'autre sa décision et adresse copie de cette signification au greffe du
tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.
"Lorsque l'un des partenaires met fin au pacte civil de solidarité en se mariant, il
en informe l'autre par voie de signification et adresse copies de celle-ci et de son acte
de naissance, sur lequel est portée mention du mariage, au greffe du tribunal d'instance
qui a reçu l'acte initial.
"Lorsque le pacte civil de solidarité prend fin par le décès de l'un au moins des
partenaires, le survivant ou tout intéressé adresse copie de l'acte de décès au greffe
du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.
"Le greffier, qui reçoit la déclaration ou les actes prévus aux alinéas
précédents, porte ou fait porter mention de la fin du pacte en marge de l'acte initial.
Il fait également procéder à l'inscription de cette mention en marge du registre prévu
au cinquième alinéa de l'article 515-3.
"À l'étranger, la réception, l'inscription et la conservation de la déclaration
ou des actes prévus aux quatre premiers alinéas sont assurées par les agents
diplomatiques et consulaires français, qui procèdent ou font procéder également aux
mentions prévues à l'alinéa précédent.
"Le pacte civil de solidarité prend fin, selon le cas :
"1° Dès la mention en marge de l'acte initial de la déclaration conjointe prévue
au premier alinéa ;
"2° Trois mois après la signification délivrée en application du deuxième
alinéa, sous réserve qu'une copie en ait été portée à la connaissance du greffier du
tribunal désigné à cet alinéa ;
"3° À la date du mariage ou du décès de l'un des partenaires.
"Les partenaires procèdent eux-mêmes à la liquidation des droits et obligations
résultant pour eux du pacte civil de solidarité. A défaut d'accord, le juge statue sur
les conséquences patrimoniales de la rupture, sans préjudice de la réparation du
dommage éventuellement subi."
Article 2
Après l'article 506 du code civil, il est inséré un article 506-1 ainsi
rédigé :
"Art. 506-1. - Les majeurs placés sous tutelle ne peuvent conclure un pacte civil de
solidarité.
"Lorsque au cours d'un pacte civil de solidarité l'un des partenaires est placé
sous tutelle, le tuteur autorisé par le conseil de famille ou, à défaut, le juge des
tutelles peut mettre fin au pacte selon les modalités prévues au premier ou au deuxième
alinéa de l'article 515-7.
"Lorsque l'initiative de rompre le pacte est prise par l'autre partenaire, la
signification mentionnée aux deuxième et troisième alinéas du même article est
adressée au tuteur."
Article 3
Le titre XII du livre Ier du code civil est complété par un chapitre II ainsi
rédigé :
"Chapitre II
"Du concubinage
"Art. 515-8. - Le concubinage est une union de fait, caractérisée par une vie
commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes,
de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple."
Article 4
I. - Le 1 de l'article 6 du code général des impôts est complété par un
alinéa ainsi rédigé :
"Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité défini à l'article 515-1
du code civil font l'objet, pour les revenus visés au premier alinéa, d'une imposition
commune à compter de l'imposition des revenus de l'année du troisième anniversaire de
l'enregistrement du pacte. L'imposition est établie à leurs deux noms, séparés par le
mot : "ou"."
II. - Après le 6 de l'article 6 du code général des impôts, il est inséré un 7 ainsi
rédigé :
"7. Chacun des partenaires liés par un pacte civil de solidarité est
personnellement imposable pour les revenus dont il a disposé l'année au cours de
laquelle le pacte a pris fin dans les conditions prévues à l'article 515-7 du code
civil.
"Lorsque les deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité et soumis à
imposition commune contractent mariage, les dispositions du 5 ne s'appliquent pas.
"En cas de décès de l'un des partenaires liés par un pacte civil de solidarité et
soumis à imposition commune, le survivant est personnellement imposable pour la période
postérieure au décès. "
III. - Les règles d'imposition et d'assiette, autres que celles mentionnées au dernier
alinéa du 1 et au 7 de l'article 6 du code général des impôts, les règles de
liquidation et de paiement de l'impôt sur le revenu et des impôts directs locaux ainsi
que celles concernant la souscription des déclarations et le contrôle des mêmes impôts
prévues par le code général des impôts et le livre des procédures fiscales pour les
contribuables mentionnés au deuxième alinéa du 1 de l'article 6 du code général des
impôts s'appliquent aux partenaires liés par un pacte civil de solidarité qui font
l'objet d'une imposition commune.
Article 5
I. - Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 777 bis ainsi
rédigé :
"Art. 777 bis. - La part nette taxable revenant au partenaire lié au donateur ou au
testateur par un pacte civil de solidarité défini à l'article 515-1 du code civil est
soumise à un taux de 40 % pour la fraction n'excédant pas 100 000 F et à un taux de 50
% pour le surplus.
"Ces taux ne s'appliquent aux donations que si, à la date du fait générateur des
droits, les partenaires sont liés depuis au moins deux ans par un pacte civil de
solidarité "
II. - À l'article 780 du code général des impôts, les mots : "article
777" sont remplacés par les mots : "articles 777, 777 bis".
III. - L'article 779 du code général des impôts est complété par un III ainsi
rédigé :
"III. - Pour la perception des droits de mutation à titre gratuit, il est effectué
un abattement de 300 000 F sur la part du partenaire lié au donateur ou au testateur par
un pacte civil de solidarité défini à l'article 515-1 du code civil. Pour les mutations
à titre gratuit entre vifs consenties par actes passés à compter du 1er janvier 2000 et
pour les successions ouvertes à compter de cette date, le montant de l'abattement est de
375 000 F.
"Cet abattement ne s'applique aux donations que si, à la date du fait générateur
des droits, les partenaires sont liés depuis au moins deux ans par un pacte civil de
solidarité."
Article 6
I. - Après le quatrième aliéna de l'article 885-A du code général des
impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
"Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité défini par l'article 515-1
du code civil font l'objet d'une imposition commune. "
II. - Au II de l'article 885 W du code général des impôts, après les mots :
"Les époux", sont insérés les mots : "et les partenaires liés par
un pacte civil de solidarité défini par l'article 515-1 du code civil".
III. - A l'article 1723 ter-00 B du code général des impôts, après les mots :
"Les époux", sont insérés les mots : "et les partenaires liés par
un pacte civil de solidarité défini par l'article 515-1 du code civil".
Article 7
Le premier alinéa de l'article L. 161-14 du code de la sécurité sociale est complété
par une phrase ainsi rédigée :
"Il en est de même de la personne liée à un assuré social par un pacte civil de
solidarité lorsqu'elle ne peut bénéficier de la qualité d'assuré social à un autre
titre."
Article 8
Les dispositions des articles L. 223-7, L. 226-1, quatrième alinéa, et L. 784-1 du code
du travail sont applicables aux partenaires liés par un pacte civil de solidarité.
Article 9
Le dernier alinéa de l'article L. 361-4 du code de la sécurité sociale est ainsi
rédigé :
"Si aucune priorité n'est invoquée dans un délai déterminé, le capital est
attribué au conjoint survivant non séparé de droit ou de fait, au partenaire auquel le
défunt était lié par un pacte civil de solidarité ou à défaut aux descendants et,
dans le cas où le de cujus ne laisse ni conjoint survivant, ni partenaire d'un pacte
civil de solidarité, ni descendants, aux ascendants."
Article 10
Le deuxième alinéa de l'article L. 523-2 du code de la sécurité sociale est ainsi
rédigé :
"Lorsque le père ou la mère titulaire du droit à l'allocation de soutien familial
se marie, conclut un pacte civil de solidarité ou vit en concubinage, cette prestation
cesse d'être due."
Article 11
Le deuxième alinéa (1°) de l'article L. 356-3 du code de la sécurité sociale
est ainsi rédigé :
"1° Se remarie, conclut un pacte civil de solidarité ou vit en
concubinage ;".
Article 12
La conclusion d'un pacte civil de solidarité constitue l'un des éléments
d'appréciation des liens personnels en France, au sens du 7° de l'article 12 bis de
l'ordonnance no 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour
des étrangers en France, pour l'obtention d'un titre de séjour.
Article 13
I. - Dans la deuxième phrase du quatrième alinéa de l'article 60 de la loi no
84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction
publique de l'État, après les mots : "raisons professionnelles,", sont
insérés les mots : "aux fonctionnaires séparés pour des raisons
professionnelles du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de
solidarité".
II. - Dans l'article 62 de la loi no 84-16 du 11 janvier 1984 précitée, après les
mots : "raisons professionnelles", sont insérés les
mots :" , les fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du
partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité".
III. - Dans les premier et deuxième alinéas de l'article 54 de la loi no 84-53 du 26
janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique
territoriale, après les mots : "raisons professionnelles", sont insérés
les mots :", les fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du
partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité".
IV. - Dans l'article 38 de la loi no 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions
statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, après les mots :
"raisons professionnelles", sont insérés les mots : ", les
fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel ils
sont liés par un pacte civil de solidarité".
Article 14
I. - Après le troisième alinéa de l'article 14 de la loi no 89-462 du 6
juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi
no 86-1290 du 23 décembre 1986, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
"- au profit du partenaire lié au locataire par un pacte civil de
solidarité ;".
II. - Après le septième alinéa du même article 14, il est inséré un alinéa ainsi
rédigé :
"- au partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité ;".
III. - Dans la deuxième phrase du premier alinéa du I de l'article 15 de la même loi,
après les mots : "bailleur, son conjoint,", sont insérés les mots :
"le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité enregistré à la
date du congé,".
IV. - Dans la deuxième phrase du premier alinéa du I du même article 15, après les
mots : "ceux de son conjoint", le mot : "ou" est remplacé
par les mots : ", de son partenaire ou de son".
Article 15
Les conditions d'application de la présente loi sont fixées par décrets en
Conseil d'État.
Le décret relatif aux conditions dans lesquelles sont traitées et conservées les
informations relatives à la formation, la modification et la dissolution du pacte civil
de solidarité est pris après avis de la Commission Nationale de l'Informatique et des
Libertés.
La présente loi sera exécutée comme loi de l'État.
Fait à Paris, le 15 novembre 1999.
Jacques Chirac
Par le Président de la République :
Le Premier ministre,
Lionel Jospin
La ministre de l'emploi et de la solidarité,
Martine Aubry
Le garde des sceaux, ministre de la justice,
Élisabeth Guigou
Le ministre de l'intérieur,
Jean-Pierre Chevènement
Le ministre des affaires étrangères,
Hubert Védrine
Le ministre de l'économie,
des finances et de l'industrie,
Christian Sautter
Le ministre de l'équipement,
des transports et du logement,
Jean-Claude Gayssot
Le ministre de la fonction publique,
de la réforme de l'État et de la décentralisation,
Émile Zuccarelli
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