MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR

DIRECTION DES LIBERTÉS PUBLIQUES
ET DES AFFAIRES JURIDIQUES
DLPAJ / ECT/ 4 B/ SÉJOUR
N°NOR: INT/D/99/00251/C

Paris, le 10/12/1999

LE MINISTRE DE L'INTÉRIEUR
À
MESDAMES ET MESSIEURS LES PRÉFETS
MONSIEUR LE PRÉFET DE POLICE
Direction de la police générale

OBJET : Application de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée aux partenaires d'un pacte civil de solidarité (PaCS).
La loi n°99-944 du 15.novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité dispose en son article 12 que « la conclusion d'un pacte civil de solidarité constitue l'un des éléments d'appréciation des liens personnels en France, au sens du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France pour l'obtention d'un titre de séjour ».
L'objectif affiché par le législateur consiste à assurer le respect effectif dû aux étrangers non mariés résidant en France, qui y ont noué et développé des liens personnels et affectifs, alors que l'accent avait été porté jusque là essentiellement sur, la protection de la seule vie familiale, au sens de l'article 8-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH).
Par la conclusion d'un pacte civil de solidarité (PaCS), l'étranger inscrit ses liens personnels dans une situation juridique, créatrice de droits et obligations, et distincte d'une simple relation de concubinage. Le Conseil constitutionnel dans sa décision 99-419 du 9 novembre 1999 a ainsi précisé que « les obligations auxquelles sont assujettis les signataires d'un pacte civil de solidarité les placent dans une situation différente de celles des personnes vivant seule ou en concubinage ».
L'objet de la présente circulaire est donc d'apprécier les conséquences, au plan du droit au séjour, qu'il convient de tirer de la signature d'un PaCS par un étranger que d'autres éléments permettent par ailleurs de rattacher aux bénéficiaires de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance.
La situation des étrangers parties à un PaCS doit toujours être examinée à la lumière des prescriptions de l'article 7-4 du décret modifié du 30 juin 1946 qui précise que « pour l'application du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité, de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ».
De même, les instructions contenues dans ma circulaire NOR : INTD9800108C du 12 mai 1998 (II, B 7°) relatives aux conditions d'admissibilité au bénéfice de l'article 12 bis 7° demeurent applicables, en particulier en ce qui concerne l'appréciation de la situation de concubinage pour l'admission au séjour. A l'exception de la présence d'enfants, que vous n'opposerez pas aux signataires d'un PaCS, et des autres points expressément modifiés par la présente circulaire, l'ensemble des critères énoncés reste intégralement applicable, à savoir notamment :

  • · la nationalité française ou, s'il est de nationalité étrangère, la régularité du séjour du partenaire attestée par la production d'une carte de séjour temporaire, d'une carte de résident en cours de validité ou du récépissé de renouvellement de l'un de ces titres ;
  • · la justification du caractère notoire et relativement ancien de sa relation de couple en France qui n'est jamais présumée ;
  • · l'absence de possibilités de poursuivre cette relation à l'étranger.

En outre, je rappelle que la réserve d'ordre public est bien entendu toujours opposable et que vous devez notamment continuer à refuser de prendre en compte les demandes émanant d'étrangers vivant en état de polygamie en France.
Sous ces réserves, je vous invite à apporter une attention particulière aux demandes d'admission au séjour ou de renouvellement de carte de séjour qui pourraient vous être soumises par des ressortissants étrangers partenaires d'un Français, d'un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un étranger en situation régulière, dans le cadre d'un PaCS.

1 : Délivrance d'un premier titre de séjour « vie privée et familiale » sur le fondement de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance, fondée sur la conclusion ou l'existence d'un PaCS.
Vous pourrez être saisis d'une demande d'admission au séjour au titre de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, émanant d'un ressortissant étranger séjournant sur le territoire français depuis plusieurs années. Dans cette hypothèse, la conclusion d'un pacte civil de solidarité doit être accompagnée de la preuve par tous moyens d'une communauté de vie effective, le Conseil constitutionnel ayant souligné, dans sa décision précitée, que « la vie commune mentionnée par la loi déférée suppose, outre une résidence commune, une vie de couple ».
Ainsi la réunion de ces deux éléments constitue une présomption raisonnable de stabilité de la situation personnelle de l'intéressé et un indice pertinent de sa volonté d'insertion dans la société française, particulièrement renforcé si l'autre partenaire est un Français ou un citoyen de l'Union européenne.
Je précise qu'il vous appartient de vérifier à chaque demande d'admission au séjour sur le fondement de l'article 12 bis 7° présentée par un étranger partenaire à un PaCS, qu'est produite une attestation, datée de moins de trois mois, du greffe du tribunal d'instance de son lieu de naissance ou du tribunal de grande instance de Paris en cas de naissance à l'étranger, certifiant l'engagement ou non dans les liens du PaCS. Vous pourrez appliquer ce délai par assimilation avec le délai de trois mois prescrit par l'article 70 alinéa 2 du code civil pour les actes de naissance remis par les futurs époux à l'officier d'état civil devant célébrer le mariage.

a) Étranger ayant conclu un PaCS avec un Français
Vous pourrez considérer que la condition de stabilité du lien personnel dont se prévaut le demandeur est notamment remplie quand l'étranger signataire d'un PaCS, valide, apporte la preuve d'une ancienneté de vie commune d'au moins trois ans avec un Français, dans notre pays, quelle que soit la date à laquelle le PaCS a été conclu.
Je précise, également, que dans le cas où un partenaire étranger de Français présente un visa de long séjour, en vue de l'obtention d'un titre de séjour « visiteur » vous prendrez en compte, dans l'appréciation de son niveau de ressources, les revenus de son partenaire français.

b) Étranger ayant conclu un PaCS avec un ressortissant de l'Union européenne
Par analogie avec la situation des partenaires de Français, les étrangers ressortissants d'Etats tiers partenaires de ressortissants d'Etats membres de l'Union européenne dans le cadre d'un PaCS se voient délivrer un titre de séjour dans les mêmes conditions en application du principe d'égalité de traitement conféré par le droit communautaire.
À cette occasion, j'attire également votre attention bien que cette situation ne relève pas des conditions d'application de l'article 12 bis 7°, sur le cas du ressortissant communautaire partenaire d'un Français ou d'un ressortissant d'un autre Etat membre de l'Union européenne, auxquels vous pourrez délivrer, après vérification du respect de la condition de continuité de vie commune précitée, une carte CEE « non actif » de cinq ans, en prenant en considération les revenus des deux parties au PaCS, dans la mesure où il ne pourrait. se prévaloir par ailleurs d'un droit au séjour découlant directement du droit communautaire

c) Étranger ayant conclu un PaCS avec un étranger non ressortissant d'un Etat de l'Union européenne.
Vous pourrez considérer que la condition de stabilité du lien personnel dont se prévaut le demandeur est notamment remplie quand il apporte la preuve d'un concubinage effectif d'une certaine durée qui ne devrait être qu'exceptionnellement inférieure à cinq ans avec un étranger non ressortissant d'un Etat de l'Union européenne en situation régulière, et assorti de la conclusion d'un pacte civil de solidarité.
De même, un PaCS conclu depuis au moins trois ans avec un étranger en situation régulière, et non dissous, devrait permettre la délivrance d'un titre de séjour « vie privée et familiale », sous réserve de la preuve d'une continuité de vie commune avec son cocontractant. La situation régulière du partenaire sera attestée par une carte de résident ou une carte de séjour temporaire, ou le récépissé de renouvellement de l'un de ces titres
En revanche le présent dispositif n'a pas vocation à s'appliquer aux étrangers partenaires de titulaires d'une carte de séjour temporaire portant la mention « étudiant ». Le législateur a en effet entendu limiter les possibilités de changement de statut des étrangers entrés en France pour suivre un enseignement supérieur (article 12 bis 3, article 15-12° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée) car ils ont vocation, au terme de leurs études, à retourner dans leur pays pour l'enrichir des connaissances acquises en France. Ainsi l'octroi d'un titre « vie privée et familiale » au partenaire de l'étudiant pourrait faciliter les risques de détournement de procédure, car il encouragerait l'étudiant à demeurer en France à un autre titre que celui pour lequel il y est autorisé.

II : Demande de renouvellement d'une carte « vie privée et familiale » sur le fondement de l'article 12 bis 7 de l'ordonnance, fondée sur l'existence d'un PaCS
Le renouvellement annuel d'une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est subordonné au respect des prescriptions de l'article 8-7 du décret modifié du 30 juin 1946, lequel dispose que « l'étranger déjà admis à résider en France qui sollicite le renouvellement d'une carte de séjour temporaire présente à l'appui de sa demande (...) s'il relève des dispositions de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée. les pièces justifiant que ces dispositions lui sont toujours applicables ».
Dès lors, il convient de vérifier, à chaque demande de renouvellement d'un titre de séjour « vie privée et familiale » délivré à l'étranger partenaire d'un PaCS, que sont produits une attestation, datée de moins de trois mois, du greffe du tribunal d'instance de son lieu de naissance ou du tribunal de grande instance de Paris en cas de naissance à l'étranger, certifiant l'engagement ou non dans les liens du PaCS, ainsi que les justificatifs de toute nature démontrant la continuité de vie commune entre les partenaires, sur le sol français.
Vous veillerez à l'application diligente des présentes instructions et ne manquerez pas de me signaler toute difficulté qui pourrait survenir lors de leur mise en œuvre.

Jean-Pierre CHEVÈNEMENT

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